Comment Mariame pourrait elle avancer sans aide ? Mariame (2)

mer. 9 sept. 2020, Mariame, par Bessy

Dans un pays à deux niveaux de vie comme le notre, la pauvreté dans laquelle nous vivions poussait certains jeunes à la criminalité, ce que je déplorais et condamnais.

Ma mère, qui n’a jamais laissé paraître ses problèmes conjugaux et ayant toujours doré le blason de mon père auprés de nous, dissimulait de moins en moins bien le fait que son mariage avec notre père commençait à battre de l’aile. En effet, ayant fait part à mon père de son impression peu favorable sur sa dernière épouse ainsi que de son comportement qui était dédaigneux et incorrect à son égard, il s’était mis en colère et lui avait fait savoir qu’elle n’avait pas à s’immiscer dans leur ménage sous prétexte que sa première femme en avait fait de même avec elle. Il lui rappela qu’elle se devait de respecter Deliyah, sa troisième épouse. Cette jeune femme le menait par le bout du nez, en se l’accaparant et en créant toute sortes de distorsions entre mon père et ma mère et, par conséquence, elle l’éloignait davantage de nous. Ma mère, avait donc débuté sa quatrième grossesse alors qu’elle n’étais pas très sereine, mon père la délaissant peu à peu ,ce que j’ai vite ressenti. Ma mère, de nature si joviale, l’était moins, bien qu’elle le fasse paraître car elle n’aimait pas nous inquiéter. Elle travaillait toujours d’arrache pied alors que souvent, elle se plaignait de crampes et de douleurs au niveau de son ventre ; Nous étions donc toutes mobilisées mes sœurs et moi et nous occupions d’elle, nous la massions lorsqu’elle revenait du marché et lui faisions son repas et la dorlotions comme un bébé. C’était notre bébé ! Le matin, lorsque je me levais pour aller au collège, et qu’à son habitude, ma mère s’était levée à l’aube pour se rendre cher le maraîcher, j’avais cette boule au ventre qui persistait car je ne me sentais jamais rassurée de savoir qu’elle était au travail alors que je repensais à son état de la veille ; maman devenait maladive et ca se voyait, mais elle le cachait en se battant corps et âme. Je la confiais à Dieu Tout Puissant, bien que je me sentais très triste de me sentir si impuissante. - Combien de fois lui avais je proposé de la remplacer au marché sans qu’elle ne me gronde en me rappelant que je ne devais plus lui demander cela, la priorité étant aux études - Combien de fois, désespérée, j’ai tenté d’appeler mon père pour lui faire part de l’état de ma mère sans qu’il ne décroche - Combien de temps a t-il été absent, sans donner ni prendre de ses nouvelles ? - Combien de fois ai je imploré Dieu Tout Puissant, les larmes aux yeux, lui déclarant mon désarroi face à cette situation qui m’inquiétait énormément ? Je n’arrivais même plus à me concentrer en cours tellement j’étais inquiète, ce que mon instit, Monsieur Badiane, qui me considérait comme sa fille et qui me soutenait beaucoup, remarqua un jour. Alors que la cloche sonnante annonçait la récréation, il me demanda de rester en classe et je ne bougeais pas de mon banc alors que mes camarades de classes sortaient bruyamment de la salle. Une fois qu’ils l’aient quittée et que leur joyeux brouhaha se fut dissipé pour se répandre dans la cour de récréation, il referma la porte. L’INSTIT, s’approchant de mon pupitre, le visage inquiet : Mariame, tu n’est plus concentrée comme d’habitude, aussi j’ai remarqué que tu es toujours dans ton coin, tu te renfermes sur toi même, tu ne participes plus en cours alors que d’habitude tu les anime, tu semble triste et parais ailleurs quand j’explique les leçons, et tes notes sont en chute libre. Aussi, Madame Gningue m’a raconté qu’elle t’avait vue en larmes pendant son cours de français, que se passe t’il ? Il était tellement compatissant, sentiment que l’on ne m’avait pas témoigné depuis le début de mes soucis que je n’ai pas pu m’empêcher de pleurer. Je cachais mon visage de mes mains pendant qu’il m’observait, l’air anxieux, à l’attente d’une réponse. J’étais vraiment à fleur de peau. Moi qui ,d’habitude, cachais toujours mes problème et veillais à les régler seule et en toute discrétion me retrouvais là, en sanglots, face à mon instit. Il s’agissait de ma mère, mon amie, ma confidente, mon cœur, mon âme, mon tout, celle pour qui je me battais jours et nuits, celle qui était la causes de tous ces efforts scolaires… A quoi me servait il de continuer tout en sachant qu’elle allait mal ? MOI, sanglotant : C’est ma mère…Elle est malade et je m’inquiète constamment pour elle Je me mettais à lui expliquer ce qui se passait et il m’écouta patiemment et attentivement et au bout de mon récit, il me demanda de sécher mes larmes et décidait de me déposer chez moi à la fin des cours afin de rendre visite à ma mère comme il s’inquiétait de son état. Je me sentais un peu plus soulagée de lui avoir confié ce secret qui me rongeait intérieurement. Enfin une personne qui allait nous aider ! Le soir, à la fin des cours nous nous rendions chez moi, la distance me paraissait tellement longue car je n’arrêtais pas de penser à l’état de ma mère, elle n’était pas en grande forme ce matin et je m’inquiétais beaucoup. Aussi, Monsieur Badiane ayant remarqué mon anxiété me rassura et accéléra. Quelques minutes plus tard, nous nous retrouvions devant le vieil immeuble où nous logions, il était assez vétuste mais seuls d’honnêtes gens y habitaient, des gens qui gagnaient leur argent par la sueur de leur front. Nous habitions un quartier en banlieue dakaroise réputé dangereux, mais que voulez vous ? Dans un pays à deux niveaux de vie comme le notre, la pauvreté dans laquelle nous vivions poussait certains jeunes à la criminalité, ce que je déplorais et condamnais. Nous habitions au rez de chaussée de cet immeuble et les cris de mes sœurs provenant de notre appartement m’ont vite alertés, je courais et ouvrais la porte, complètement affolée pour trouver ma mère couchée par terre, le visage souffrant, se tenant le ventre et les visages de mes sœurs étaient larmoyants, elles criaient « Yaye ! » Je ne sais pas d’où m’est venu ce sang froid lorsque j’interpellais mon professeur pour qu’il m’aide à la soulever, nous nous dirigions maintenant vers la voiture où nous installions ma mère à l’arrière, je l’allongeais et m’installais à ses cotés , posant sa tête sur mes cuisses et lui caressant délicatement le visage tout en essuyant son visage qui était en sueurs, j’avais un pincement au cœur à la vue de son visage crispé. J’ordonnait à mes petites sœurs de rester à la maison et je n’eus même pas besoin de demander à monsieur Gningue de nous conduire à la maternité qui se trouvait Dieu merci pas très loin de chez nous.


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